Et si un documentaire réalisé par le YouTuber le plus suivi de France devenait un nouvel exemple en relations publiques ? Avec « Merci Internet », Squeezie ne se contente pas de raconter une histoire : il bouscule les frontières entre divertissement, engagement et stratégie de communication. Une campagne RP non dite, mais parfaitement maîtrisée.

Sorti en mai 2024, le documentaire « Merci Internet » de Squeezie est bien plus qu’un hommage aux débuts de sa carrière ou aux créateurs du web. À travers un format sincère, nostalgique et créatif, il réussit à captiver les publics, générer un buzz massif, et créer une valeur immatérielle forte autour de la culture numérique.
Cet article propose d’analyser « Merci Internet » comme une campagne de relations publiques non commerciale, en explorant ses objectifs cachés, ses moyens de communication et sa réception médiatique. Une démarche qui illustre la montée en puissance des créateurs de contenu comme acteurs à part entière des RP modernes.
Un documentaire, ou un manifeste de communication digitale ?
Une stratégie narrative bien rodée
À première vue, Merci Internet se présente comme un documentaire intimiste et nostalgique. Pourtant, derrière son ton simple et sincère, se cache une véritable stratégie narrative. Le film alterne archives personnelles, témoignages d’autres créateurs (Cyprien, Natoo, Norman…), séquences émotionnelles et moments humoristiques. Ce mélange parfaitement dosé permet de maintenir l’attention tout en créant une proximité émotionnelle avec le spectateur.
Le rythme est fluide, le montage soigné, et l’esthétique visuelle renforce cette impression de professionnalisme discret. Loin de se limiter à l’auto-promotion, Squeezie propose ici un récit collectif, qui met en lumière toute une génération de créateurs et rend hommage à une époque du web que beaucoup ont connue ou observée.
Objectifs cachés du projet
Même si « Merci Internet » ne s’affiche pas comme une campagne de communication, ses objectifs cachés sont clairs :
- Revaloriser la culture web auprès de tous, souvent dénigrée ou méprisée.
- Mettre en lumière les métiers du numérique, en montrant l’évolution de ces carrières longtemps considérées comme informelles.
- Asseoir la légitimité de Squeezie en tant que l’une des figures centrale de cet univers, mais aussi en tant que créateur engagé et producteur de contenu qualitatif.
Le projet sert ainsi une stratégie d’image subtile mais efficace : montrer sans expliquer, raconter sans vendre.
Un documentaire qui mêle récits personnels et l’histoire collective du web
Au-delà du parcours individuel de Squeezie, « Merci Internet » dresse le portrait d’une époque. Celle des débuts d’Internet en France, de l’arrivée des plateformes comme Dailymotion, puis YouTube, et de l’émergence d’une nouvelle génération de créateurs de contenus qui ont tout appris par eux-mêmes. En tissant les témoignages de figures emblématiques du web, il archive une mémoire numérique souvent négligée par les médias traditionnels.
Ce rôle de « mémoire vivante » permet aussi d’ancrer le documentaire dans une démarche sociétale : reconnaître l’impact culturel du web, et l’analyser comme un fait social total, mêlant divertissement, entrepreneuriat, éducation et créativité.
Les astuces RP activées par « Merci Internet »
Le buzz maîtrisé
La sortie de « Merci Internet » a été pensée comme un véritable événement. Quelques semaines avant sa diffusion sur Prime Video, Squeezie a lancé des teasers énigmatiques sur ses réseaux, alimentant la curiosité de sa communauté. L’annonce officielle, accompagnée d’une bande-annonce soignée, a déclenché une vague d’enthousiasme immédiate.
La stratégie de lancement repose sur plusieurs piliers RP :
- L’effet d’attente, construit avec des messages courts mais marquants.
- Le partenariat avec Amazon Prime, qui donne au projet une dimension professionnelle et légitime.
- La mobilisation de la communauté, qui relaie massivement le contenu sur les réseaux.
Résultat : des millions de vues dès les premières heures, des tendances sur Twitter/X, et une diffusion organique sans achat d’espace publicitaire traditionnel.
Une stratégie de communication post-diffusion bien pensée
La stratégie RP ne s’est pas arrêtée à la sortie du documentaire. Après sa diffusion, une série de prises de parole a été organisée : interviews dans les médias traditionnels, extraits publiés sur TikTok et YouTube Shorts, publications d’anecdotes en coulisses. Cette stratégie de contenu étalée dans le temps prolonge l’attention médiatique et garantit une durée de vie plus longue au message.
Cette approche illustre l’importance du temps long en relations publiques : il ne s’agit pas uniquement de faire un « coup », mais de construire un récit durable.
Une réception médiatique très positive
Le succès ne s’est pas limité aux réseaux sociaux. Merci Internet a bénéficié d’une forte couverture médiatique dans les grands médias (Le Monde, France Inter, Télérama, etc.). Ces retours soulignent la qualité de la production, mais aussi la pertinence sociétale du message porté.
La presse a salué :
- La dimension pédagogique du documentaire.
- La maturité du propos, loin du contenu habituellement associé à YouTube.
- La capacité de Squeezie à faire le pont entre nostalgie et regard critique.
Cette double reconnaissance, à la fois populaire et institutionnelle, renforce l’impact de la campagne et élargit son audience au-delà de sa communauté de fans.
Le rôle d’Amazon Prime dans le projet
La diffusion sur Amazon Prime Video donne au documentaire une crédibilité nouvelle. En effet, être diffusé sur une plateforme de streaming internationale est à la fois un gage de qualité mais aussi un signe que le contenu a le potentiel de toucher un large public. Ce partenariat permet également à Squeezie de sortir de l’écosystème YouTube et d’aller chercher un public plus large, parfois moins connecté à la culture des créateurs en ligne.

Une campagne RP… sans en avoir l’air
Squeezie, influenceur et stratège de sa propre image
L’un des aspects les plus intéressants de ce projet est la capacité de Squeezie à orchestrer sa propre communication. En maîtrisant chaque élément du récit, il contrôle non seulement la mémoire collective de sa carrière, mais aussi la perception du public.
Il ne s’agit pas ici de « vendre » une marque, mais de renforcer un lien affectif avec un public fidèle, et de cultiver une image de créateur réfléchi, sensible, presque « adulte ». Cette forme de storytelling personnel est aujourd’hui l’une des compétences les plus prisées dans les RP contemporaines.
Un bon travail de communication indirecte
Ce que montre « Merci Internet », c’est qu’il est possible de faire de la communication de manière puissante sans qu’elle soit perçue comme telle. L’absence de message commercial, de placement de produit ou d’appel à l’action direct renforce la crédibilité du projet. Et pourtant, les retombées en termes d’image sont considérables.
Le documentaire contribue à :
- Améliorer la réputation des créateurs de contenu.
- Éduquer à la valeur culturelle du web.
- Positionner Squeezie comme un acteur culturel à part entière, et non plus simplement comme un influenceur divertissant.
On pourrait qualifier cette stratégie de “soft power numérique”, où l’influence passe par le récit, l’émotion et l’identification plutôt que par la persuasion ou la publicité.
RP ou Influence ? Des frontières de plus en plus fines
Avec « Merci Internet », on observe une nette évolution : les créateurs de contenu deviennent eux-mêmes des agents de communication capables de mobiliser des outils autrefois réservés aux agences ou aux marques. Cette nouvelle hybridation entre influence et relations publiques pose la question suivante : qui fait les RP aujourd’hui ? Les agences… ou les créateurs ?
Cette question est cruciale, car elle oblige les professionnels des RP à repenser leur rôle. Face à des créateurs capables de générer de la confiance, de l’engagement et de la viralité avec des moyens limités mais beaucoup de talent, les stratégies classiques doivent s’adapter, innover et apprendre à collaborer.
Conclusion
À travers « Merci Internet », Squeezie réalise une opération de communication exemplaire, sans jamais la nommer ainsi. En mobilisant les outils du storytelling, en orchestrant sa diffusion, et en provoquant une adhésion massive, il démontre que les créateurs de contenu peuvent être de redoutables stratèges RP. Ce cas illustre l’évolution des relations publiques, qui ne passent plus seulement par les institutions ou les agences, mais aussi par des figures capables d’incarner, de raconter et de rassembler.
Coucou Maud, je te félicite pour ton article, il est très intéressant. C’est agréable de voir comment les relations publiques ont évoluées avec les nouveautés d’aujourd’hui. Continue sur cette voie !